Où on remet le couvert avec les journées de permanence administrative, et où on le vit super bien.
Cher professeur du Collège Jean Roucas,
Tu es en vacances, je le sais.
Ne me mens pas.
J'entends le cri des mouettes et le bruit du ressac en arrière plan.
(Ou bien c'est qu'il est temps pour toi d'acheter un nouveau lave-vaisselle)
(Ou d'arrêter le Karaoké)
(D'URGENCE).
Je t'imagine, alors, rayonnant(e) comme jamais, profitant d'un repos gagné à la sueur du front d'élèves récalcitrants, installé quelque part du côté de Mogadiscio (ou de toute autre ville exotique que je serais incapable de situer sur un planisphère, Grenoble incluse), étendu(e) de tout ton long dans un hamac en fibres 100 % naturelles issues du commerce équitable (tressé en Seine St Denis par d'authentiques shamans guatémaltèque), ou bien en trekking sauvage à flan de Vésuve, une fleur dans tes cheveux, et la mer, et le ciel dans ton regard (qui n'a jamais été si bleu, j'en jurerai, quelle qu'ait été sa couleur d'origine) ; ou même, pourquoi pas, soyons fous, en train de siroter un double Martini on the rocks (l'abus d'alcool est dangereux pour la santé, l'abus de cailloux aussi, ayez soif de modération) au bras de cette charmante actrice italienne dont le nom m'échappe mais qui, en son temps, aura fait tourner quelques têtes et causé quelques lumbagos (ou à celui de George Clooney, si tu préfères, à déguster un nespresso-what-else qu'il rêve de te piquer - mais chut, je ne t'ai rien dit !), pendant que moi, si triste, si seul, je suis assis à mon bureau au 2 rue de Valsoleil, dans mon vieux pullover élimé, tout entier occupé à tenter de faire abstraction du soleil dans mon dos (celui-là même qui me commande de tout plaquer pour m'en aller gambader dans la nature aux côtés des petits lapinous) ou, à défaut, de chasser de mon esprit l'air qui s'y est logé, souvenir d'une vieille chanson passée de mode qui sonnait un peu comme ceci :
"Est-ce que tu viens pour les vacances ?
Moi je n'ai pas changé d'adresse
Je serais, je pense
Un peu en avance
Au rendez-vous du semainier hebdomadaire (rime riche)
Je reviendrais photocopier
Une fiche de paie, un arrêté
Puis j'irais me prendre un café
En revenant de ton casier".
Aussi serais-je en droit d'en concevoir de l'amertume, de t'en vouloir, te jalouser, te détester (et même de fabriquer de petites poupées en pailles à ton effigie). Ce serait légitime. Aucune cour de justice n'aurait le coeur de le retenir contre moi. Mais ce n'est pas mon genre. Je suis plus cruel et mesquin que ça, moi. Raison pour laquelle je t'envoie ci-joint, en justes représailles, un petit avant-goût de ce qui t'attend, bientôt.
TRES bientôt.
Mais pas trop, heureusement.
En te souhaitant aussi, sans plaisanter cette fois, des vacances reposantes et pleines de bons moments.
--
Le secrétariat de direction
Cher professeur du Collège Jean Roucas,
Tu es en vacances, je le sais.
Ne me mens pas.
J'entends le cri des mouettes et le bruit du ressac en arrière plan.
(Ou bien c'est qu'il est temps pour toi d'acheter un nouveau lave-vaisselle)
(Ou d'arrêter le Karaoké)
(D'URGENCE).
Je t'imagine, alors, rayonnant(e) comme jamais, profitant d'un repos gagné à la sueur du front d'élèves récalcitrants, installé quelque part du côté de Mogadiscio (ou de toute autre ville exotique que je serais incapable de situer sur un planisphère, Grenoble incluse), étendu(e) de tout ton long dans un hamac en fibres 100 % naturelles issues du commerce équitable (tressé en Seine St Denis par d'authentiques shamans guatémaltèque), ou bien en trekking sauvage à flan de Vésuve, une fleur dans tes cheveux, et la mer, et le ciel dans ton regard (qui n'a jamais été si bleu, j'en jurerai, quelle qu'ait été sa couleur d'origine) ; ou même, pourquoi pas, soyons fous, en train de siroter un double Martini on the rocks (l'abus d'alcool est dangereux pour la santé, l'abus de cailloux aussi, ayez soif de modération) au bras de cette charmante actrice italienne dont le nom m'échappe mais qui, en son temps, aura fait tourner quelques têtes et causé quelques lumbagos (ou à celui de George Clooney, si tu préfères, à déguster un nespresso-what-else qu'il rêve de te piquer - mais chut, je ne t'ai rien dit !), pendant que moi, si triste, si seul, je suis assis à mon bureau au 2 rue de Valsoleil, dans mon vieux pullover élimé, tout entier occupé à tenter de faire abstraction du soleil dans mon dos (celui-là même qui me commande de tout plaquer pour m'en aller gambader dans la nature aux côtés des petits lapinous) ou, à défaut, de chasser de mon esprit l'air qui s'y est logé, souvenir d'une vieille chanson passée de mode qui sonnait un peu comme ceci :
"Est-ce que tu viens pour les vacances ?
Moi je n'ai pas changé d'adresse
Je serais, je pense
Un peu en avance
Au rendez-vous du semainier hebdomadaire (rime riche)
Je reviendrais photocopier
Une fiche de paie, un arrêté
Puis j'irais me prendre un café
En revenant de ton casier".
Aussi serais-je en droit d'en concevoir de l'amertume, de t'en vouloir, te jalouser, te détester (et même de fabriquer de petites poupées en pailles à ton effigie). Ce serait légitime. Aucune cour de justice n'aurait le coeur de le retenir contre moi. Mais ce n'est pas mon genre. Je suis plus cruel et mesquin que ça, moi. Raison pour laquelle je t'envoie ci-joint, en justes représailles, un petit avant-goût de ce qui t'attend, bientôt.
TRES bientôt.
Mais pas trop, heureusement.
En te souhaitant aussi, sans plaisanter cette fois, des vacances reposantes et pleines de bons moments.
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Le secrétariat de direction
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