Où l'on a dangereusement pris goût aux week-end de trois jours et où le sevrage est un peu compliqué.
Cher Week-end de trois jours,
Si j'oublie ma fierté ce soir et si je prends ma plus belle plume pour t'écrire ce message, avec toute la sincérité dont la nature a jugé bon de pourvoir l'individu de sexe masculin (à savoir : 50 % de déni et 50 % de mauvaise foi), c'est pour te dire que tu me manques. Ni plus. Ni moins. Tu me manques même comme aucun autre week-end ne m'a manqué jusqu'à présent. Je sais que j'ai beaucoup papillonné, que je suis passé de l'un à l'autre sans état d'âme. J'ai même, je le confesse, été butiner à plusieurs reprises du côté des vacances scolaires, une, deux, trois, quatre, cinq semaines d'affilées, ça m'est arrivée, je le reconnais. Je ne vais pas te mentir. Avec elles, j'ai vécu de moment de folle insouciance et (surtout) de grasse mâtinée jusqu'à 14 heures. Mais c'est fini, tout ça. Je te le jure. Je suis un secrétaire administratif nouveau.
Je l'ai compris ce mardi 26 mai, quand le réveil m'a tiré du sommeil avec la cuistrerie qu'on lui connaît, et que j'ai découvert ton post-it sur ma table de nuit. "Je pars, as-tu écrit, acheter des cigarettes". Dans un premier temps, j'y ai cru, bien sûr, je n'ai pas honte de l'avouer. Pendant des jours, je t'ai gardé ta part de purée-saucisses au frigo en attendant ton retour. Je m'étais appliqué : j'avais même réussi à faire en sorte qu'on ne sente plus le goût des flocons de patate lyophilisés, caractéristiques des purées Mousseline (ma spécialité). Seulement voilà. Ce soir, je suis obligé de me rendre à l'évidence : soit tu t'es moqué de moi (soit tu m'as "enfumé", pourrais-je dire si j'avais le cœur à rire !), soit tu es parti les acheter en Espagne par cartouches de dix mille et tu t'es fait coincer à la frontière.
Sache, en tout cas, que tout au long de cette semaine, je n'ai pas cessé de penser à toi. Chaque seconde, de chaque minute, de chaque heure écoulée. J'ai même rêvé de toi à plusieurs reprises, au cours de ces longs moments où je dors les yeux ouvert assis à mon poste de travail (c'est un de mes petits secrets, ne l'ébruite surtout pas, je ne voudrais pas perdre mon poste !). Aussi envisagé-je, dans un proche avenir, de me faire tatouer ton prénom quelque part où ça ne ferait pas trop mal, avec un coeur percé d'une flèche et peut-être des petits oiseaux comme dans les films de Walt Disney.
Car j'en suis là. Je suis accro. Je ne peux pas me passer de ma petite journée de repos supplémentaire.
Aussi, je t'implore à genoux : reviens. Je te promets que (presque) plus jamais je n'irai voir ailleurs.
Je t'aime, week-end de trois jours.
Je pense à toi.
Et à toute l'équipe du Collège aussi, à laquelle je souhaite un excellent week-end... mais de deux jours seulement.
Les âmes les plus affectée par la nouvelle pourront venir chercher des kleenex gratuits au secrétariat.
P.S. : pour conclure sur une note plus positive, M le CPE signale qu'en passant par la Vie Scolaire, vous pourrez dès lundi vous porter acquéreur d'une SPLENDIDE photo de classe TOUTE EN COULEUR, collector et numérotée, pour la MODIQUE somme de 5 euros, dont l'intégralité sera reversé à l'association caritative "une Ferrari Testa Rossa pour M le CPE". Venez nombreux, c'est pour la bonne cause !
-- Le secrétariat de direction
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