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It's the End of the Semainier as we know it (and I feel fine)

Où les conséquences (inattendues) du message de la semaine dernière nous contraignent à faire notre mea culpa et à mettre un terme à cette belle aventure.



Bonsoir à tous,

Comme attendu, vous trouverez ci-joint le planning (dense – mais sans les loups) de la semaine prochaine.

Attention si vous prévoyez de l'imprimer : veillez à prévoir une ramette pleine et quatre cartouches de rechange (au moins).

Et réservez un arpent de forêt Amazonienne pour parer à toute éventualité, tant qu'il en reste encore.

*

Concernant le message d'accompagnement, j'avais initialement prévu un briefing pour l'oral de DNB façon l'Ecole des Fans, avec une très belle imitation de Jacques Martin (y compris au niveau de l'abdomen), mais on a porté à mon attention cette semaine (à juste titre et avec beaucoup de bienveillance, c'était de circonstance) que les messages d'accompagnement en question posaient plusieurs problèmes de déontologie.

Non seulement l'humour lui-même s'accorde mal à l'idée traditionnelle que l'on se fait du professionnalisme (on ne peut le nier), mais c'est surtout la dimension personnelle et politique de ces messages qui a heurté certains d'entre vous, ce que je peux entendre et me dois de considérer. Parce qu'en effet, j'écris en mon nom propre, mais en utilisant la boîte mail de l'établissement, ce qui brouille les frontières entre ce qui relève de ma personne et de l'institution, un procédé qui pourrait légitimement être assimilé à de la propagande. Car au fond, et c'est très vrai, rien ne m'empêche d'utiliser cet outil de travail à des fins servant d'autres maîtres, par petites touches, entre les lignes. Rien ne vous garantit non plus que mes boutades en apparence potaches ne servent pas de plus noirs desseins.

Et cette personne a très bien fait de m'alerter sur ces dérives possibles (voire d'ores et déjà constatées), car je suis si loin de telles considérations que je n'aurais jamais envisagé les choses sous cet angle par moi-même. Il me semble en avoir déjà fait la démonstration, il n'est pas dans mes habitudes d'avancer masqué : les messages anonymes, les listes de diffusions secrètes, les alliances d'intérêt, instrumentaliser les uns et les autres, vous le savez, ce n'est pas ma façon de faire, quand j'ai quelque chose à dire, je le dis, de manière directe et sans quérir ni attendre le soutien de quiconque, et personne ne me souffle ce que je dois penser (à part peut-être le spectre de Korzybski, dont je suis - je l'admets - le Hamlet version Wish, comme disent les jeunes entre deux Quoicoubeh) ("les enfants sont formidables"). J'ai chassé le dahu, souvent, combattu des moulins à vent à m'en péter la lance, poursuivi le monstre du Loch Ness avec un filet à papillons, prié mes propres divinités inventées sur mesure et coloriées au feutre, frappé dans mes mains pour les fées et les gens que j'admire, et patienté des heures à la fenêtre en attendant que les extraterrestres reviennent me prendre en stop. Je ne suis pas athée, je crois en plein de choses - en l'art, en l'être humain, en la possibilité d'un monde meilleur -, mais la politique n'en fait pas partie, même si je respecte ceux qui s'en réclament autant que je respecte les catholiques, les musulmans, les amateurs de foot, les fans de Céline Dion, et ceux qui vénèrent les bouts de papier froissés qu'on trouve au fond des portefeuilles, tant qu'ils n'en font pas un prétexte pour s'en prendre à autrui. Et l'on arguera à raison qu'heureusement qu'il y a eu des gens qui y croyaient, un jour, à ce Dieu Politique, pour que les gens qui comme moi n'y croient pas puissent profiter de telle ou telle avancée sociétale. J'en suis conscient, je sais ce que je dois à celles et ceux qui m'ont précédé. Et en même temps, si tous les gens d'hier ou d'aujourd'hui avaient partagé ma foi à moi, personne n'aurait eu à se battre, en quelque nom que ce soit.

On m'a demandé ici-même, je ne sais plus qui, il y a quelques années, dans le feu de l'émotion, « pour qui je travaillais vraiment ». Comme si quelqu'un d'aussi orgueilleux que moi pouvait vraiment être « la voix de son maître ». Mes maîtres, ils sont nombreux, pourtant, et tant pis si ça sonne candide : ce sont le ciel, le vent, la pluie, la lune et les étoiles au-dessus de nos têtes. A elles seules, j'accepte de rendre des comptes. Je sers l'institution (et j'insiste sur le verbe) sans honte et sans fierté, et ainsi en sera-t-il aussi longtemps que nos intérêts convergeront. Mais je ne suis pas un être politique, et je fais passer mes valeurs avant les convenances, si bien qu'il se pourrait qu'un jour nous prenions des voies séparées. Si je me reconnais si peu dans le monde qui m'entoure, c'est parce que je ne suis ni un dieu, ni un géant, rien qu'un mammifère qui marche sur deux pattes au lieu de grimper dans les arbres, et qui bombe le torse en tenue de ville pour oublier qu'il n'est rien à l'échelle de l'univers. A la cour, je n'aurais été ni monarque, ni page, ni conseiller. Rien que bouffon.

Mais il n'empêche que la remarque est légitime. Second degré ou non, dès lors qu'il est possible de deviner mes convictions entre mes lignes, mes textes ont une dimension politique. Très relative et caricaturale, car la politique vaut bien mieux que ça (j'espère), mais réelle malgré tout. Aussi me paraît-il plus sage de mettre un terme à cette tradition, dans la mesure où dès lors que j'écris autre chose que « bien cordialement », je ne peux pas cesser d'être moi ni de nourrir des convictions intimes. Par extension : je ne peux garantir qu'elles ne transparaîtront pas ça et là. Et du reste, je ne suis pas certain d'avoir envie d'écrire des textes qui ne me ressembleraient pas.

Cette même personne m'a aussi signifié (et c'est ce qui m'a le plus peiné, sans doute, vraiment), que vous êtes plusieurs à avoir souffert de ne pas avoir d'espace de réponse, de devoir subir mes mots sans pouvoir leur en opposer d'autres. De devoir laisser faire, en somme, sans pouvoir rectifier ce qui semblait indigne ou inapproprié. Vraiment, du fond du cœur, qu'ils reçoivent mes excuses pour la frustration suscitée. Je n'avais vocation, pensais-je, qu'à faire sourire un peu ou à indifférer. Nul n'était forcé de me lire et ça me rassurait, au fond. Seulement je me voilais la face.Dès l'instant où je m'exprimais, lu ou non, je faussais la donne.

Bien qu'on puisse évidemment deviner certains de mes idéaux à la marge, je n'avais pas conçu ces textes pour être pris au premier degré : au risque d'en décevoir certains, non, je suis pas pour qu'on rétablisse les châtiments corporels à l'école (je suis davantage partisan de la torture psychologique, nettement plus efficace sur le long terme), je ne considère pas vraiment les ardéchois comme des arriérés (certes, ils roulent au milieu de la route, mais est-ce bien de leur faute s'ils n'ont jamais vu une ligne droite de leur vie ?), et bon, ok, j'avoue, je ne suis pas convaincu par l'apport de Jul et d'Aya Nakamura au patrimoine culturel de l'humanité, mais personne n'est parfait.

Au-delà, je n'ai jamais eu l'intention de vous refuser le droit de réponse, au contraire : je ne suis ni assez réactionnaire, ni assez progressiste pour fermer la porte aux débats et à ceux qui y appellent. Une idée figée est une idée morte. Les gens qui nous approuvent nous font plus de mal que ceux qui nous remettent en cause. Ne fréquenter, voire n'estimer, que ceux dont nous partageons les vues, c'est se prendre soi-même dans l'ambre d'une fossilisation précoce. Aussi suis-je implicitement toujours parti du principe que si certains de mes propos vous semblaient critiquables ou suscitaient une réaction, vous pouviez venir me trouver ou m'écrire pour que nous en discutions.

Et parce que mieux vaut tard que jamais, comme on aime à dire dans la fonction publique, je vous invite très chaleureusement à le faire aujourd'hui, demain, après-demain, n'importe, de la façon qui vous siéra le mieux : en individuel ou en collectif, en privé ou en public, par courriel sur ma boîte académique (je vous transmettrai alors mon adresse perso) ou de vive voix, selon les modalités de votre choix. Objectez, contestez, fustigez s'il le faut, c'est votre droit le plus strict. La balle est dans votre camp, comme on dit en licence STAPS. On pourrait tout à fait envisager, par exemple, de se définir un créneau d'une heure ou deux, en fin d'année, réserver une salle, la polyvalente, même, pourquoi pas ne pas faire ça collégialement, puisque je me suis moi-même exprimé à la cantonade ?! Je suis ouvert à toutes les propositions, même les plus désavantageuses, sauf celles impliquant de devoir se battre en duel à l'aube parce que je ne suis pas du matin, ou d'utiliser des muscles quelconques parce que je n'en ai pas. Ça pourrait être une expérience intéressante, d'ailleurs, dont personnellement j'apprendrais beaucoup. Plus que de se refaire un Booba-Kaaris dans l'octogone, on pourrait renouer ainsi avec la tradition des penseurs grecs, jouer à être Aristote, ou Sophocle, ou Diogène, je pourrais venir en toge ou nu dans un tonneau, selon la météo, en hommage à un temps où les débats publics ne se réduisaient pas à Cyril Hanouna, et où l'information n'était pas qu'une valeur marchande conçue comme un spot de publicité pour viser les plus jeunes. Outre l'occasion de crever sainement ces abcès, ce serait celle de finir l'année sur une touche originale, et pourquoi pas festive ? Depuis le temps que je rêve de mon moment à la Gladiator, moi, face à la foule, criant "êtes-vous bien divertis ?", ce serait l'opportunité. Simplement, si l'on pouvait remplacer les lions par des marmottes, j'aimerais autant. Et alors si en plus, elles pouvaient mettre le chocolat dans le papier alu, moi je vous dis banco.

Tout est politique, m'a-t-on dit ce jour-là, et si je comprends l'idée, et si je la respecte, je ne suis pas d'accord avec elle, ne serait-ce que parce que cela impliquerait que vos cours le sont également et ce serait moralement discutable, à tout le moins, de par la nature malléable du public auxquels ils s'adressent. 

A cela, donc, j'oppose : tout est poétique, au sens que lui donne l'étymologie grecque. Ce qui nous englobe vous et moi.

Et sur cette ultime pirouette pleine de mystère, je prends congé pour de bon, dans un bruit de grelots.



C'était le dernier.



A bientôt pour davantage de « bien cordialement »,



-- 
 
Le secrétariat

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