Accéder au contenu principal

T'es pas toi quand t'as faim ! (2/2)

Où le message du semainier est la suite directe de ce qui vient avant, ce qui est étonnement logique pour un vendredi après-midi. Et où, par conséquent, n'aura une vague chance de comprendre que ceux qui auront lu la publication précédente. A bon entendeur...

 

 

Jour à tous (ou Soir, suivant l'heure à laquelle vous prendrez connaissance de ce message).

Je n'ose pas écrire "bon" devant, je m'en voudrais de vous mentir, encore que cette culpabilité me hanterait fort peu - et plus comme Casper que comme Zoul, pour les experts en sciences occultes.

Comme attendu avec une fébrilité modérée, je vous transfère ci-joint le planning de la semaine prochaine, que je devrais vous vendre à coups de périphrases grandiloquentes telles que "avec le semainier, les réceptions de l'ambassadeur sont toujours un succès" ou "il arrive toujours au bon moment, mais sans son pain ni ses croissants, parce que c'est pas l’armée du salut non plus, oh, tu l'as pris pour qui, l'ami semainier ? !".

Je devrais vous le peindre comme un tableau impressionniste accroché à l'envers par un galeriste indélicat, vous dire qu'il s'agit d'une tablette mystique trouvée au fond d'une pyramide Inca, qui vous permettra à l'heure près de prédire le déroulement des sept prochains jours ; toutes les âneries que j'ai pris l'habitude d'écrire chaque vendredi depuis plus de six ans et que vous supportez avec la bienveillance de qui sait reconnaître une cause désespérée et s'en tenir à distance respectable (c'est le métier qui parle).

Seulement voilà. Finie la fantaisie. Finis les faux-semblants. Le semainier n'est qu'un vulgaire fichier excel, réduit à sa plus simple expression, dont les couleurs criardes, associées sans goût ni talent,  rappellent le maquillage de toutes les petites filles lors de leur première boum, quand elles étalent le blush à la moissonneuse-batteuse et tartinent le rimmel au couteau Nutella. Aucune finesse, aucune nuance, aucune sobriété - et sûrement pas la mienne, qui boit pour oublier - que j'ai oublié de boire, la plupart du temps.

Car aujourd'hui, je ne me voile plus la face. Je sais que le semainier est hideux, difforme et maladroit, comme s'il renvoyait mon reflet avec les intérêts, digne d'une activité périscolaire dans un centre aéré pour cul-de-jatte des deux bras.

En le finalisant, cette fois, je n'ai rien ressenti de la fougue qui m'habite habituellement, semblable à celle que Michel Ange a lui-même éprouvé quand il a finalisé le plafond de la chapelle sixtine et qu'il a décidé, au tout dernier moment, "que ça aurait quand même plus de gueule en remplaçant les pandas par des êtres humains" (personnellement, je ne suis pas convaincu, mais c'est lui que ça regarde).

Tout ce que ce document m'a inspiré, ce soir, tient de l'ennui et de l'indifférence, comme s'il était diffusé sur Arté mais sans les sous-titrages. 

Par conséquent, je ne vous souhaiterai pas non plus un bon week-end parce que qu'est-ce qu'un week-end, au fond, si ce n'est un misérable petit tas de jours (j'épouse celui ou celle qui aura la référence), une poignée d'heures plus vite passées que le temps des cerises (et dont ne reste trop vite que le noyau), en grande partie consacrées à passer l'aspirateur et à rembobinez le fil de la prise à la main parce que le bouton ne fonctionne plus qu'à moitié. Rien de bien exaltant.

Alors je soupire en fixant le mur devant moi, qui ne m'inspire lui aussi que de la mélancolie. Car qu'est-ce qu'un mur, donc, si ce n'est un misérable petit tas de briques ? (ou de bouts de carton assemblés au scotch double-face, dans le cas du collège, mais chut ! L'architecte nous en voudrait de dévoiler ses secrets de fabrications ! Et en même temps, évitez de vous appuyer trop fort aux parois de votre salle, un accident est si vite arrivé)

(après, c'est moi qui remplis les formulaires et les renvoie au rectorat...).

Sur mon bureau, dans un cadre fantaisie décoré de marguerites : la photo d'un Snickers, allongé sur une serviette de plage, ses formes généreuses mises en valeur par un bikini comestible emprunté à Lady Gaga.

Dessus, j'ai dessiné trois coeurs au stabilo rose.

Et j'ai ajouté la mention "si tu reviens, j'annule tout".

Je vous avais bien dit dans mon mail d'hier que "tout me paraîtrait fade, après le coup du Snickers".

Et si vous ne l'avez pas lu, j'ai envie de dire : c'est tant pis pour vous.


Vous souhaitant un week-end,

De façon très vaguement cordiale,

-- 
 
Le secrétaire de direction

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

L'Inclusion un point c'est tout

Où l'on reprend un peu la plume après quelques défections et messages paresseux, pour remettre les points à leur juste place, à savoi r : sur les i.   Bonsoir à tous, Au risque de vous choquer et en complément du planning ci-joint, figurez-vous qu'en 2024, aussi ubuesque que cela paraisse, il y a encore des gens qui utilisent l'écriture inclusive. Je sais. Moi aussi, ça m'a surpris, quand j'ai lu cette semaine " chef.fe.s " dans un mail rectoral, avant de courir me laver les yeux au gel hydroalcoolique (ça tombe bien, il en reste plein) (par contre, je comprends maintenant pourquoi mes parents m'ont appris que ce n'est pas bien de se rincer l’œil. En tout cas, je confirme que c'est très douloureux). Innocemment, quand les gourous de la socio ont lancé la mouvance pour se détendre entre deux ventes pyramidales (et sur le même principe), je m'étais dit : " bon, ok, c&#

It's the End of the Semainier as we know it (and I feel fine)

Où les conséquences (inattendues) du message de la semaine dernière nous contraignent à faire notre mea culpa et à mettre un terme à cette belle aventure. Bonsoir à tous, Comme attendu, vous trouverez ci-joint le planning (dense – mais sans les loups) de la semaine prochaine. Attention si vous prévoyez de l'imprimer : veillez à prévoir une ramette pleine et quatre cartouches de rechange (au moins). Et réservez un arpent de forêt Amazonienne pour parer à toute éventualité, tant qu'il en reste encore. * Concernant le message d'accompagnement, j'avais initialement prévu un briefing pour l'oral de DNB façon l' Ecole des Fans , avec une très belle imitation de Jacques Martin (y compris au niveau de l'abdomen), mais on a porté à mon attention cette semaine (à juste titre et avec beaucoup de bienveillance , c'était de circonstance) que les messages d'accompagnement en q

Coming Out

Où la triste actualité de ces dernières semaines a été la goutte d'eau qui a fait déborder le vase trop plein depuis longtemps, et où on troque l'humour contre le cri du coeur, quitte à se dévoiler plus qu'on ne le devrait.      Je me souviens d'Annecy, un autre, il y a longtemps. De la lumière, partout, surtout, du vert, du bleu, intenses, éblouissants, dans le ciel et la terre entre les montagnes et dans l'onde et sur le dos de l'herbe qui frissonne et les ronds qui clapotent en chœur parmi les vagues et le sillage des pédalos. Je m'y suis brûlé la rétine à force, brûlé les poumons d'inspirer trop fort, gavé de couchers de soleil jusqu'à vomir des arc-en-ciels. Je me souviens le vent. Je me souviens les voix, les rires sur les bateaux, ivres d'un éternel parfum de printemps couleur d'apéro en terrasse. Annecy, mes premières bouffées d'air. Mes premiers pleurs. Mes premiers cris